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174 LE GESTE VOCAL ET LA POSE DE LA VOIX

Prenons une comparaison. Pour faire bien entendre
un piano dans une salle de concert, le plus
simple est de l’ouvrir, c’est-à-dire de mettre la
sonorité de sa caisse en communication directe
avec la cavité de la salle. Si en plus on lâche les
cordes et si on leur donne leur maximum de liberté
de vibration en appuyant sur la pédale de force,
on obtient ainsi le maximum de sonorité avec le
minimum d’effort dans la percussion. Il semblerait
absurde de fermer le piano, d’étouffer les cordes
avec la pédale de sourdine et de chercher à donner
le plus de son possible en frappantfort. C’est cependant
ce dernier procédé qu’emploient beaucoup de
chanteurs et de professeurs. Sombrer la voix, l’enfermer
dans la poitrine, la gorge, la bouche ou le
nez, c’est fermer le piano; serrer la voix, appuyer,
écraser le son, donner tout son souffle, chanter
sous pression, c’est à la fois mettre la sourdine et
frapper de toutes ses forces; c’est donner toute sa
vitesse en serrant les freins. Aucune voix n’y résiste.
Beaucoup de professeurs font même fermer la
bouche pour mieux poser ~a voix. Il est impossible
de chanter en pinçant en plus les narines, sans
quoi il se trouverait des professeurs qui préconiseraient
ce mode de travail; j’en sais d’ailleurs qui font
fermer au moins une des narines pour apprendre à
poser la voix. On ne peut aller plus loin dans l’absurde.
Il est regrettable que vous, qui vous destinez à
chanter dans de grandes salles, vous appreniez à
chanter dans des peliles salles. Pour apprendre à
tirer, il faut voir le but, et non regarder la crosse
de son fusil. La première r,hose à éduquer chez
vous, c’est l’oreille, qui seule doit guider et con-