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LES POMMIERS. Arbres et arbustes.

Famille des pomacées. — Pomme commune. Malus communis. — Variétés principales. Fameuse, fruit moyen rouge foncé, chair blanc de neige, sucrée. Saint- Laurent, fruit gros, strié de rouge. Grise, fruit petit, grisâtre rouge, parfumé.

Par derrière chez mon père.
Vole, mon coeur vole.
Par derrière chez mon père.
Lui y a-t-un pommier doux.
Chanson canadienne.)

Pierre Boucher, dans son «Histoire Naturelle de la Nouvelle- France, » termine le chapitre relatif aux « arbres qui croissent au Canada » par cette remarque : « On n’a point encore planté ici d’arbres de France, sinon quelques pommiers qui rapportent de fort bonnes pommes et en quantité,
mais il y a bien peu de ces arbres ».
A ce paragraphe, Benjamin Suite ajoute la petite note suivante : « En 1608, le sieur de Monts avait envoyé à Québec des plants d’arbres fruitiers de la Normandie. Louis Hébert, arrivant en 1617, apporta quelques tiges de pommiers ».
Boucher écrivait en 1664, vingt ans après la fondation de Montréal, et bien qu’il donne une description de !’« île de Mont-Royal » et de ses produits, il ne parle pas de ses pommiers.
Au cours d’un article sur « Le sucre d’érable », Benjamin Suite écrit encore :
« Talon établit parmi nous des filatures, des brasseries, planta des arbres fruitiers, des pommiers surtout et sut diriger ces travaux scientifiquement.
C’est ainsi peut-être que nous avons aujourd’hui la « pomme fameuse » de Montréal, prisée au-dessus de toutes les pommes de France ».
Il nous semble alors évident que nos variétés de pommes les meilleures : la St-Laurent, la grise et surtout celle surnommée « la fameuse » sont le résultat d’une culture savante dans un excellent milieu.
Eh bien ! c’est bizarre. Terre des plus propices pour la culture des pommes, l’île de Montréal attendait patiemment, depuis des siècles, le jour où l’on déposerait dans son sein le petit pépin qu’elle nourrirait, ferait croître et produire au-delà des espérances les plus optimistes.
Oh ! la « Fameuse » la bien nommée ! On l’a promenée de marché en marché, d’exposition en exposition, et partout elle a conquis le premier rang, partout sa « chair d’un blanc de neige, sucrée, tendre et délicieuse » a obtenu la faveur des gourmets.
Nos horticulteurs l’ont envoyé, un jour, dans son pays d’origine, la terre classique de la pomme, pour la comparer avec ses soeurs d’outre-mer et leur faire voir ce qu’était devenue, au Canada, cette descendante d’une même famille. Elle fut conviée aux fêtes agronomiques de la pomme, en France, et la petite canadienne remporta le grand prix d’honneur du concours de 1884. Les Français n’en revenaient pas ! La Normandie était battue.
Les poètes le chantèrent et l’un d’eux, Célestin-Aimé Prêt, commençait une longue poésie par ces strophes dithyrambiques :

Beau fruit qui, vers l’automne et par le flot amer.
Nous vient des verts paj’s que caressent la mer
Et des grands lacs l’onde écumeuse.
Douce pomme, toi qui — chacun sait ton renom —
Portes dans tout le nord d’Amérique le nom
Si bien mérité de « fameuse » !
Là-bas, dans les vergers qui ceignent Montréal
De couronnes de fleurs, aux jours de Floréal, —
Fleurs de pommiers roses et blanches, —
Au coeur de la corolle où tu dormais encor
As-tu parfois oui le chant aux notes d’or
Dans la sombre épaisseur des branches ?…

Le verger est une chose admirable. Pour s’en rendre compte il faut y avoir fait une promenade au printemps et à l’automne ; il faut avoir vu

… le pommier que l’aube arrose
S’épanouir dans sa candeur,

devenir un immense bouquet de fleurs ; il faut avoir assisté à la chute lente et molle des pétales fanés, à l’époque de la floraison ; il faut avoir contemplé l’arbre après la fructification, alors que les branches ploient sous la charge des fruits jolis et savoureux qui rougeoient au sein de la feuillée verte ; il faut avoir écouté le bruit mât de leur chute lorsqu’ils se détachent du rameau pour choir dans la corbeille des herbes épaisses qui couvrent le sol. Il fut un temps où Montréal fut le paradis de la pomme.
S. E. Dawson écrit quelque part, dans une page que je résume ainsi :
« En faisant halte, avec sa nombreuse armée, près du fort de la montagne, située sur le coteau nord de notre ville, le général Amherst vit toute la surface qui s’étendait devant lui jusqu’aux fortifications de Montréal, couverte de champs de maïs, de « vergers » et d’arbustes. »
Hélas! nos beaux vergers ! ils s’effacent rapidement devant la marée montante des habitations. Le « plus grand Montréal » va les faire disparaître et bientôt la « fameuse » ne sera plus qu’un souvenir du passé, si l’on ne fait pas un effort pour la conserver, ce qui serait facile, car il est admis, aujourd’hui, qu’elle peut venir partout, dans notre province, du moins au sud des Laurentides.
Ne perdons pas la fameuse !
Ajoutons qu’elle est bien vue à la table royale. On raconte même, que le roi Edouard VII, alors qu’il était « prince de Galles fit planter dans son verger de Sandringham une cinquantaine de jeunes pommiers de fameuse. Ces pommiers ont réussi là-bas, mais il manque à leurs fruits, cette belle couleur et ce goût spécial que leur communique notre terroir ». Aussi notre souverain s’en fait-il venir tous les ans de Montréal.
Quand aux propriétés médicinales de la pomme en général, voici ce que nous lisons dans un journal d’outre-mer :
« Chacun sait qu’il n’est rien de meilleur que de manger une pomme bien mûre avant de se coucher, et cela ne peut faire aucun mal, même à un estomac délicat. La pomme est un excellent aliment pour le cerveau, parce qu’elle contient plus d’acide phosphorique en éléments assimilables que n’importe quel autre fruit. Elle stimule les sécrétions du foie, elle provoque un sommeil profond et salutaire et est un excellent désinfectant de la bouche. Mais ce n’est pas tout : elle prévient aussi les indigestions et les diverses maladies de la gorge ; enfin, on en fait un thé délicieux ».
Dans le langage des fleurs, le pommier signifie : préférence. N’est-ce pas bien trouvé ?

 

EXTRAIT de CENT FLEURS DE MON HERBIER. ÉTUDES SUR LE MONDE VEGETAL A LA PORTÉE DE TOUS. PAR E.-Z. MASSICOTTE

 

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