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L’expédition anglaise contre les Ashantis : réception par un chef de tribu d’un émissaire venant annoncer l’approche des Anglais. (gravure 1874)

L’expédition contre les Ashantis
Nous avons, dans un de nos précédents numéros, donné un dessin représentant le passage du Prah par la petite armée commandée par sir Garnet Wolseley.
Les deux dessins que nous publions aujourd’hui complètent la physionomie qu’offre cette partie du royaume des Ashantis, couverte de forêts qui étendent sur de larges espaces une ombre formidable. Là trouvent
asile les plus redoutables bêtes féroces : le lion, la panthère, l’hyène et des peuplades entières de grands singes. Dans ces forêts croissent à l’envi cocotiers, palmiers, tamariniers, papayers, et le colossal baobab,
ont le tronc, miné par le temps, se creuse en vastes salles, et dont les rameaux projetés au loin pourraient abriter plusieurs régiments. Les abeilles y foisonnent ainsi que les moustiques, et une espèce de fourmi si nombreuse et si rapace qu’un troupeau attaqué par ces insectes, pendant une nuit, a été retrouvé le lendemain à l’état de squelettes. Après les pluies, dont la première saison commence fin mai, et la seconde en octobre, la campagne se revêt d’une végétation aussi splendide que vigoureuse. Le riz, le maïs, le millet y croissent presque sans culture dans un terrain fin, gras et rougeâtre, et composent presque exclusivement avec l’igname, la farine de manioc et le poisson, la nourriture des indigènes, peu difficiles d’ailleurs sur le choix des aliments. Quand l’occasion s’en présente, en effet, ils mangent volontiers la chair
musquée des crocodiles qui infestent leurs cours d’eau et leurs marécages. L’Ashanti est assez industrieux ; il tisse et teint le coton, travaille, mais grossièrement, l’or que son sol renferme en abondance, et sait construire une maison avec beaucoup d’art. Celles de leurs villages ne le cèdent en rien aux maisons des nôtres sur plus d’un point. Quant à son vêtement, ce n’est pas la peine d’en parler. Il n’y a guère que dans
la classe riche que l’on essaye de s’habiller. Les principales pièces qui constituent l’habillement d’un chef sont une sorte de casque formé de cornes de cerf dorées que domine un bouquet de plumes d’aigle, et des
bottes de peau rouge montant jusqu’à la moitié des cuisses. Le caboceer ou grand noble porte comme signe distinctif une ombrelle. Ajoutons que dans les cérémonies d’Etat, les bras de ces hauts personnages
sont tellement surchargés de bracelets d’or, qu’ils sont obligés de les appuyer sur la tête ou sur l’épaule d’esclaves dont ils se font tout exprès accompagner. En revanche, comme l’indigène, le soldat va presque
nu. Il a pour armes plusieurs couteaux attachés à une sorte de collier, et, à défaut de fusil, un arc et une lance, ce qui ne l’empêche pas de se battre très-vaillamment, comme les Anglais l’ont appris à leurs dé
pens à la bataille du 29 janvier, où sir Garnet Wolseley a été victorieux mais a perdu le quart de son effectif.
On sait qu’à la suite de cette victoire il est entré sans résistance à Coumassie, le 4 février. Le roi des Ashantis devait venir l’y rejoindre pour signer la paix, mais il se ravisa, et sir Wolseley, voyant qu’il ne pou
vait compter sur les promesses de ce roi fourbe, cruel et défiant, et pressé de regagner la côte par l’approche de la première saison des pluies, donna : d’incendier la ville. « La destruction est complète, écrit-il à son gouvernement, et je crois que la diminution du prestige et de la puissance militaire des Ashantis sera telle que le royaume périra. Jamais eut-être un gouvernement si atroce n’avait existé. leur capitale était un charnier; et leur religion une combinaison de cruauté et de mensonge. » Le meurtre fait en effet partie essentielle des cérémonies religieuses des Ashantis, et c’est à flots que le sang humain y est versé, particulièrement aux fêtes du Yam
et de l’Adaï. La foule du peuple rassemblée en ces occasions est excitée par la musique, les tambours et les trompettes du grand fétiche et par de larges distributions de rhum. Quand la furie sauvage de cette foule
est au comble, on lui livre les victimes, et elle les massacre avec une férocité qui dépasse celle de tous les animaux carnassiers connus.